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mardi 16 juillet 2019

Mai 2019 : "I can only imagine" d'Andrew et Jon Erwin (2018)


Au Texas, au début des années 80, le jeune Bart, 10 ans, subit au quotidien la violence physique et psychologique de son père Arthur. Celui-ci semble lui faire payer sa situation un peu misérable et lui reproche constamment de « rêver » : « Les rêves ne payent pas les factures ». Bart aime en particulier écouter dans son walkman le groupe U2 ou la chanteuse chrétienne Amy Grant. Mais la seule distraction qui trouve

grâce aux yeux de son père acariâtre est le football américain. Un jour, sa mère quitte le foyer familial, le laissant seul face au « monstre » (comme il l’appellera plus tard). Au lycée, Bart joue dans l’équipe de football, mais après un choc grave qui lui fracture les chevilles, il doit renoncer à cette voie, et donc à contenter son père. Il intègre à contrecœur la chorale de l’école et découvre bientôt ses talents de chanteur. Après son bac,
il quitte son père, qui le considère comme un « bon à rien », et forme un groupe de rock chrétien avec lequel il sillonne les routes à la recherche du succès. Celui-ci tarde à venir. Un soir de désillusion, Brickell, le manager du groupe, lui conseille d’affronter son passé s’il veut s’accomplir en tant qu’artiste : « Tu sais, Bart ? J’ai beau ne pas toujours croire en ta musique, mais je crois en toi. Je crois en ton talent. Ne lâche pas. » Bart revient à Greenville, chez son père. Il découvre qu’il est atteint d’un cancer du pancréas en phase terminale et qu’il a accompli, en son absence, un cheminement de rédemption chrétienne.

La Voix du pardon est un film américain des frères Erwin, Andrew et Jon, réalisateurs, scénaristes et producteurs évangéliques. Il raconte l’histoire vraie de Bart Millard, chanteur du groupe MercyMe. Son titre original, I can only imagine, est celui de la chanson du premier album que le groupe a signé avec un grand label. Elle est devenue rapidement un tube dont le succès a débordé l’audience de son genre musical, au point d’être la seule chanson chrétienne contemporaine certifiée double disque de platine (plus de 2 millions d’exemplaires vendus). Millard a écrit les paroles et composé la musique avec son groupe en quelques minutes seulement, en repartant en tournée après la mort de son père. Mais cet élan de créativité a été inspiré par une expérience de vie. C’est de cette expérience singulière et touchante que le film veut rendre compte.

J’ai été voir La Voix du pardon en famille, avec mon épouse et deux de mes filles. Si l’on en juge par les larmes d’émotion que nous avons tous versées, le film fonctionne bien. « J’ai adoré mais c’était hyper triste » m’a dit la plus grande (15 ans) à la sortie. « En même temps, j’ai trouvé ça bien, le fait qu’il pardonne à son père. Je pense que j’y serais pas arrivée. » « Je trouve qu’il chante bien », m’a dit la cadette (11 ans). « Il a une super belle voix, mais c’est pas trop mon style de musique. Et je trouve que le film était hyper touchant. Et qu’il faut vraiment aller le voir. Parce que moi qui suis pas très sensible aux films, il m’a fait pleurer. Ce qui est bien, c’est que tu crois que le père, il ne va jamais changer, qu’il va toujours être agressif et méchant, mais en fait, il change, il devient gentil, il se convertit à Dieu. Et le fils, il est fort ; c’est quand même horrible, ce qu’il vit, et il arrive à exprimer en chansons tout ce qu’il a vécu ; moi, j’arriverais pas. »
Même si moi aussi j’ai été ému, je pense que le scénario aurait gagné en force et efficacité s’il avait été moins elliptique avec certaines réalités.
Le fait qu’Arthur était alcoolique n’est jamais montré, et on n’assiste pratiquement à aucune scène de violence physique de sa part sur Bart.  On ne se rend pas vraiment compte du calvaire que Bart vivait chez lui, et cela réduit le chemin de pardon qu’il accomplit au côté de son père moribond. Ce choix scénaristique est peut-être destiné à donner une certaine élégance à la dramaturgie tout en facilitant la crédibilité de la dernière partie.
Autre élément éludé : le passé d’Arthur qui permettrait de comprendre son comportement. A part le fait qu’il ait dû renoncer à une carrière dans le football américain, il n’est jamais fait mention de son grave accident de travail, sur un chantier de construction, qui l’a laissé avec une lésion cérébrale. « Resté dans le coma pendant une semaine, quand il s’est réveillé, il avait perdu sa capacité à réguler sa colère », lit-on dans le dossier de presse.
Enfin, on a l’impression que Bart ne passe que quelques semaines avec son père avant sa mort, alors qu’en réalité il a passé deux ans à vivre à ses côtés.
Les scénaristes ont donc beaucoup élagué dans la réalité et sa complexité, notamment celle qui concerne le personnage du père, et ces trous laissent le spectateur un peu perplexes…
Cela explique aussi peut-être la prestation paradoxalement assez décevante du seul acteur connu de la distribution, Dennis Quaid (1), qui joue Arthur.
En revanche, J. Michael Finley, dont c’est le premier rôle au cinéma, est très bien dans le rôle de Bart.
Un dernier bémol relatif à la chanson I can only imagine : révélée dans la scène finale, elle relève plus de la soupe évangélique que de la petite merveille annoncée…


(1) L’Etoffe des héros de Philip Kaufman (1983), Traffic de Steven Soderbergh (2000), Le jour d’après de Roland Emmerich (2004)…

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