J’ai été voir Le Promeneur
d’Oiseau en famille, et j’ai eu l’impression inédite que nous formions un échantillon
parfait de public-cible. Cette production franco-chinoise peut toucher bon
nombre de familles citadines privilégiées dont les enfants sont menacés par le
syndrome « I » (Ipad/Ipod/Iphone), caractérisé par un manque de
contact et d’intérêt pour le réel en général et pour la nature en particulier. Plus
globalement, le film colle à l’air du temps de nos sociétés post-modernes, où les
familles ont tendance à « produire » des enfants-rois.
L’histoire est simple et
peut-être comprise par tous. Ainsi, la cadette de mes filles (6 ans) a-t-elle
trouvé le film « super
bien ! », et la puînée (10 ans) a « adoré : c’était très émouvant ! Elle a
appris un peu la vie avec son grand-père. Ses parents, ils sont obsédés par le
travail ! ». « Elle », c’est Renxing, une Pékinoise de 8 ans
dont le père est un architecte en vogue et la mère une femme d’affaires ;
tous deux sont accaparés par leur vie professionnelle, et leur vie privée en souffre.
Renxing - leur fille unique - est gâtée, égocentrique… et accro à son iPad. A
la veille de vacances scolaires, alors que sa mère est envoyée en mission à
Paris, que son père est attendu à Tokyo pour un projet prestigieux, et que sa
nounou doit partir en province marier son fils, Renxing se voit confiée à son
grand-père Zhigen, qu’elle n’a pas vu depuis quatre ans. Or l’ancien paysan a
prévu de retourner en bus dans son village natal, au sud du pays, pour y
libérer un vieil oiseau de compagnie, selon une promesse faite à son épouse
décédée il y a quelque temps déjà. Le périple va transformer la petite Renxing.
Sortie de son environnement luxueux et de ses gratte-ciels en verre, la petite
peste capricieuse râle d’abord contre l’inconfort du voyage (pannes, marches
forcées dans la forêt touffue, nuits perturbées par les moustiques…). Puis elle
va peu à peu ouvrir les yeux et se familiariser avec la campagne apaisante, les
lacs d’eau claire, les rizières en terrasses, les arbres noueux centenaires, les
chenilles, les buffles… et son gentil grand-père.
Le jeu sobre de Li Bao Tian, qui
joue le vieux paysan, contribue à la réussite de ce joli film sans prétention. Le
scénario comporte quelques invraisemblances un peu trop évidentes, mais le
public-cible n’en a cure.
Pour sa première expérience de
tournage en Chine, le réalisateur Philippe Muyl a réutilisé le schéma d’amitié
inter-générationnelle qui avait déjà fait là-bas, en 2002, le succès d’un de
ses films : Le Papillon, avec Michel Serrault.
May est une Jordanienne qui vit à
New-York, où elle vient de publier un recueil de proverbes arabes. Elle est fiancée
à Ziad, un Palestinien originaire d’Amman comme elle. May se rend avant lui au
pays natal, en été, pour préparer leurs noces. Elle y retrouve ses sœurs et ses
parents. Sa mère évangéliste lui signifie tout de suite qu’elle n’assistera pas
aux célébrations parce qu’elle désapprouve le choix d’un conjoint musulman. May
se rend compte également qu’après huit ans, sa mère n’a toujours pas digéré son
divorce d’avec son père, un diplomate américain qui s’est remarié avec une
jeune Indienne. Loin de son fiancé, alors que la date fatidique approche, et qu’avancent
les préparatifs gérés par sa future belle-famille traditionnaliste musulmane,
May commence à douter…
May in the Summer, le deuxième
long-métrage de Cherien Dabis, fleure l’auto-biographie. Le problème est qu’il
est beaucoup trop « auto » et pas assez « graphique ». Qu’il
est dur de réaliser un bon film ! Surtout quand on veut, comme Cherien
Dabis, écrire le scénario, produire, réaliser, et interpréter le rôle
principal. Résultat : le jeu des comédiens est souvent démonstratif du
fait d’une absence de direction, et la mise en scène est pataude. Bill Pullman
(le père) fait ici figure de sosie pathétique de Michael Douglas ; j’ai eu
du mal à reconnaître le comédien qui interprétait pour David Lynch le schizophrène
inquiétant de Lost Highway en 1997. Quant à l’actrice franco-israélienne Hiam
Abbas (la mère), je préférais la voir il y a cinq ans dans le joli film Les
Citronniers.
Très vite, on se désintéresse de
toutes les histoires mollement déroulées, et on se raccroche aux rares scènes
où Dabis détourne (sans l’en sortir) la caméra de son nombril : quand la jolie
May fait son jogging dans Amman sous le regard concupiscent de gars hilares et sous
celui horrifié des femmes voilées - les « ninjas », comme les appelle
sa sœur - ; ou quand May fait la planche sur la mer Morte en s’étonnant de
la proximité de la rive palestinienne en face, avant d’apprendre que la mer est
truffée de mines pour dissuader les candidats à l’émigration ; ou encore, quand
May se réveille dans le désert de Wadi Rum, face aux majestueuses roches de
grès qui se dressent à pic.
D’aucuns situent May in the
Summer dans la lignée des « films féministes » réalisés par des
femmes issues de pays arabes, comme la libanaise Nadine Labaki[1].
Pour moi, ce n’est qu’un film superficiel et étriqué, à l’instar de cette
sortie de May expliquant pourquoi elle aime Ziad : « Il est tellement gentil avec moi : il a si souvent préparé
le repas pendant que je travaillais sur mon livre. Il m’apporte le
petit-déjeuner au lit ! ».
[1] Et maintenant, on va
où ? Cf Choisir décembre 2011.
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